A Goma, certains jeunes tentent de débarrasser la ville des déchets plastiques   

Des déchets plastiques sont visibles partout à Goma

Depuis décembre 2022 des jeunes réunis au sein de DEC (Droits, environnement et citoyenneté) ramassent des déchets plastiques abandonnés dans des avenues, artères et caniveaux de la ville de Goma, au Nord-Kivu, à l’Est de la RDC. Ces jeunes qui militent pour la justice climatique veulent non seulement contribuer à l’assainissement de la ville mais aussi à promouvoir la citoyenneté environnementale.   

Chaque vendredi, très tôt matin, en ville de Goma, chef-lieu du Nord-Kivu, des jeunes volontaires et militants pour la justice climatique s’activent pour ramasser des objets plastiques. Ils sillonnent des quartiers, avenues, rues et autres artères pour ramasser des sachets, flacons, souliers et autres objets plastiques abandonnés dans ces endroits. « C’est la campagne ʺVendredi Sans Plastiquesʺ », annonce Emmanuel Ndimwiza Murhonyi, coordonnateur de DEC (Droits Environnement et Citoyenneté).     

Pour ces jeunes volontaires, cette activité est aussi une occasion de promouvoir le débat citoyen autour des enjeux environnementaux au niveau national et local. « Grâce à ces actions, les citoyens peuvent acquérir des connaissances, valeurs et être motivés pour la protection et la promotion de l’environnement », opine Emmanuel Ndimwiza. Il compte sur la prise de conscience de toute la population. « Le ramassage de ces déchets est un atout et un devoir pour tout le monde.  Aujourd’hui, le recyclage des déchets plastiques devrait concerner tout citoyen sans distinction de sexe, d’âge, de religion,… Toutes les catégories et toutes les couches sociales sont conviées à y participer », suggère-t-il.

Une rue, une poubelle !

A Goma, des immondices colonisent tout : rues, avenues, carrefours, marchés, caniveaux,… Rares sont des ménages qui ont des poubelles dans leurs parcelles. Tous les déchets ménagers sont déversés nuitamment  dans des rues et avenues. « Il y a ceux qui profitent même des différentes manifestations et des tensions de colère entre certains mouvements des jeunes et des autorités politico-militaires pour déverser tous leurs déchets ménagers dans la rue », explique Kibira Alpha, un habitant de Goma.

« A côté de l’odeur nauséabonde et du concert des mouches, on voit des enfants qui transforment ces endroits en lieux de jeu, de recherches des jouets,… C’est inquiétant », a toujours dénoncé John Tsongo, journaliste à Goma et qui s’intéresse aux questions d’environnement et d’assainissement. « Nos parcelles sont trop petites et sont collées les unes aux autres. Il n’y a pas moyen de gérer les ordures ménagères et je n’ai pas d’autre choix que de les jeter dans la rue quand il fait nuit », se justifie une habitante du quartier Mabanga.

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Cette ville compte aujourd’hui des centaines d’usines qui mettent sur le marché des produits emballés dans des flacons et sachets plastiques. Ces produits proviennent des usines des vins locaux, de l’eau minérale, des produits de beauté, des liqueurs… A cela s’ajoutent des sachets plastiques importés pour servir d’emballage dans des marchés, supermarchés et alimentations.

Du coup, plusieurs axes routiers se retrouvent remplis de saletés charriées par les eaux de pluie. A certains endroits de la ville, les canaux d’assainissement sont constitués de collecteurs à ciel ouvert qui débordent, laissant les immondices dont des ordures ménagères et des déchets plastiques, charriés par les eaux, s’éparpiller dans des parcelles.

Or le barrage de Ruzizi attire comme un aimant des milliers de bouteilles, bidons et autres détritus jetés dans le lac. « Comme le lac coule vers la rivière Ruzizi, petit à petit tous les déchets qu’on y jette viennent échouer dans le barrage de cette centrale hydroélectrique. Même ceux venant de Goma, au nord du lac », explique à l’AFP Liévin Chizungu, chef de production à la centrale Ruzizi 1.

A ce rythme, les membres de DEC estime que le Lac Kivu peut aujourd’hui contenir plus de plastiques que de poissons, suite à plusieurs millions de tonnes des objets plastiques qui se déversent dans ces lacs chaque jour. Ces déchets sont aussi à la base des disfonctionnements observés à la centrale hydroélectrique de Ruzizi. « L’impact est énorme, nous avons un déficit de 6,3 mégawatts sur un total de 30 MW que nous devons produire, pas seulement pour la province du Sud-Kivu, mais aussi pour la province voisine du Nord-Kivu et le Burundi » constate le chef de production.  

Promouvoir l’écocitoyenneté

Les jeunes de DEC Organisation à Goma en pleine activité de ramassage des déchets plastiques © Photo Denise Kyalwahi

Emmanuel Ndimwiza Murhonyi, coordonnateur de DEC (Droits Environnement et Citoyenneté) et toute son équipe des jeunes volontaires pensent que mener la campagne de ramassage des déchets plastiques c’est participer à l’éveille de conscience pour la lutte contre la dégradation de l’écosystème. « C’est aussi un moment de sensibiliser, former et surveiller la dégradation de l’environnement. Il s’agit aussi de concilier les droits, l’environnement et la citoyenneté », indique-t-il. C’est l’écocitoyenneté qui veux que chacun soit responsable de ses actes et de ses impacts environnementaux.

Cette activité se heurte à plusieurs difficultés et préjugés. Il y a même ceux qui pensent que ces jeunes ramassent ces déchets plastiques pour aller les revendre et se faire de l’argent. Pourtant leur objectif est avant tout de contribuer à la salubrité de la ville. « Nous sommes exposés à plusieurs maladies car nous n’avons pas de matériel de protection. Dans certains caniveaux nous avons difficile d’extraire des déchets plastiques faute de matériels nécessaires », s’inquiète-t-il.

Le comble est que l’écocitoyenneté est relégué au dernier plan dans plusieurs programmes de développement et de lutte contre le réchauffement climatique. « Cela n’est pas prise en compte dans nos écoles depuis les bas âges. Nous voulons mettre en place un système éducatif pouvant pallier ce problème », assure Emmanuel Ndimwiza Murhonyi. Pour lui, il faut que des écoles, universités et organisations de Jeunes s’intéressent aussi à l’éducation environnementale.

Denise Kavira Kyalwahi

Publié pour la première fois sur www.naturelcd.net


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