Le boom de la viande de poule à Butembo, au Nord-Kivu
En ville de Butembo (au Nord-Kivu) la viande rouge (vache, chèvre ou porc) devient de plus en plus chère suite à la fermeture des frontières des pays voisins qui alimentent Butembo à vaches et chèvres ainsi qu’à l’insécurité dans des villages périphériques du Nord-Kivu. Certains bouchers, abatteurs et clients se tournent vers la viande de poule pour son prix qui est abordable.
Il est 17h00 ce lundi 18 mai au croisement de la rue d’ambiance et l’avenue Kyombwe, en plein centre-ville de Butembo. Alors que tout le monde se prépare à quitter le marché central, un mégaphone placé à l’entrée d’une alimentation, avec une voix féminine, vous interpelle. « Apa tuna uza nyama ya kuku kwa beyi nzuri », traduisez « ici nous vendons la viande de poule en bon prix ».
Hommes et femmes, jeunes et vieux s’y succèdent pour se procurer qui 1kg, qui une cuisse, qui d’autres, un quart de Kg ou même une poule entière. Chacun selon ses moyens. Pourtant, juste à quelques mètres de cette alimentation, fonctionnent des boucheries de vente de viande de vache ou de chèvre voire de mouton et de porc. Mais l’engouement est faible. On y voit des vendeurs qui somnolent pendant une bonne partie de la journée ou entrain de chasser des mouches.
Prix abordable et cuisson rapide
Il y a encore 5 ans, la viande de poule bouillonnait dans des casseroles seulement à l’accueil d’un visiteur de marque ou en cas de fête. « Et pour que le visiteur reconnaisse que la poule lui était destinée, il faut que le gésier fasse partie de la sauce. Les autres membres de la famille, eux se contentent des pattes et des intestins », explique Raphael Kambalume, enseignant des cours d’histoires dans des universités et instituts supérieurs du nord-Kivu.
Aujourd’hui de lieux de vente de la viande de poule prolifèrent. Elle est vendue dans des alimentations, supermarchés, boucheries. Des mégaphones et des panneaux publicitaires vous renseignent sur ces différents endroits. Et cette viande est sur tous les menus, dans des hôtels, restaurants, des fêtes et sur des tables lors de repas en famille. Et même des vendeurs ambulants vous surprennent avec cette viande dans des bistrots. « Le prix de la viande rouge comme celle de vache ou de chèvre est à la hausse et n’est pas à la portée de toutes les bourses. Alors que la viande blanche (viande de Poule, de lapin) est encore beaucoup plus accessible par presque toutes les couches sociales », explique une dame rencontrée au supermarché Kwetu Partners (Kp shop) sur rue président de la république.
Insécurité et covid-19 s’invitent
Selon plusieurs clients, « 1Kg de viande de poule se négocie à 6500Fc. C’est mieux que la viande rouge qui se négociait à 8000Fc mais qui coûte aujourd’hui 10 000 Fc le kilogramme. Et nous craignons que ce prix ne continue de hausser », explique la prénommée Défrose, qui vient d’acheter une cuisse de poule.
Des bouchés et abatteurs des vaches de Butembo qui se sentent pénalisés dans cette concurrence, justifient cette rareté des bêtes par l’insécurité dans des milieux périphériques où des groupes armés occupent la majeure partie des fermes, mais aussi la fermeture des frontières des pays qui ravitaillent l’est de la RDC en chèvres et vaches suite à la pandémie de covid-19.
« C’est l’Ouganda et la Tanzanie qui approvisionnent Butembo, Beni, Goma et Bunia en bêtes. Avec la pandémie de Covid-19, nous avons un sérieux problème d’accès aux bêtes. C’est pourquoi nous sommes aussi obligés de hausser le prix. Nous achetons ce dernier temps la viande au kilogramme, nous n’avons plus la capacité d’acheter une vache ou une chèvre entière. Les bovins coûtent extrêmement chers ici localement », s’indigne Monsieur Chady Shabani président des abatteurs de Butembo.
L’élevage domestique devient aussi une activité qui procure des revenus. Des familles s’adonnent aussi à l’élevage des petits bétails comme des poules, lapins, cobayes… dans une partie de leurs parcelles pour les revendre aux tenanciers des boucheries. Et si la situation de pandémie perdure, la viande rouge (vache, chèvre, porc,…) va disparaitre des assiettes et des plusieurs menus, en ville de Butembo.
Serge Nzanzu Muyisa
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