Les routes de la RDC mènent-elles vers les cieux ?


C’est dans la Bible qu’il est dit que « le chemin vers le ciel est parsemé d’embuches et d’épreuves ». Or, en voyant la façon dont les routes de la RDC sont pleines de bourbiers, d’obstacles et d’embuscades, on croirait qu’elles mènent aussi vers les cieux ! Nous revenons sur cette expérience de Rodriguez Katsuva, auteur de cet article sur habarirdc.net.

Quitter un lieu vers un autre par la route, c’est tout un tas d’épreuves et d’embuches à affronter, comme le dit si bien la Bible ! On croirait qu’au bout de la route congolaise on pourrait tomber sur Saint-Pierre qui ouvrirait la porte des cieux et dirait : « Bons et fidèles serviteurs, entrez dans le royaume de votre Père ! » Mais il faut de la pitié, tellement c’est rude et éprouvant les voyages terrestres au Congo !

Sur ces routes, si ce ne sont pas les braquages, les kidnappings et les tueries que bravent les voyageurs, c’est une éternité qu’ils passent dans les embûches avant d’atteindre la destination. « Vous pouvez passer une semaine à réaliser une distance de moins de 200 kilomètres ! », explique Kasereka Wasingya, ce chauffeur qui a eu à fréquenter les dures épreuves de la route Butembo Mangurejipa, longues de 100 Km. De fois il lui fallait de deux à quatre jours avec un véhicule, Land Cruiser 4X4 tout terrain pimpante neuve. 

Pourtant ce voyage aurait pris moins de 3 heures, donc moins de 50 kilomètres par heures ! Mais il devient Presque trois fois moins rapidement qu’un homme qui effectue la même distance à pieds ! Et vous savez ce qu’il y avait sur la route ? Des marécages, des nids de poule, des ponts inexistants, etc.   

Les routes qui sont toute une école

On dit que le voyage est le plus grand livre du monde. Ha, comme c’est vrai quand c’est sur les routes congolaises ! Cric forestier, traction ou encore vitesse L… Ce sont-là des mots des chauffeurs que l’on finit par apprendre quand on est embourbé sur les routes ici. Il nous a fallu 9 heures pour sortir d’un bourbier. Et là on apprend que véhicule tout terrain ne veut jamais dire vraiment tout terrain ! En tout cas, il se peut que ce soit tout terrain sauf sur les terrains de RDC. « Sans cric forestiers on ne peut pas se sortir d’ici », expliquait le chauffeur. Ou encore il faut activer le « tire-fort ». « Je ne connaissais même pas les noms de ces outils, mais aujourd’hui tout cela fait partie de mon vocabulaire ! J’ai tout appris sur cette route », explique Alphonse Safari, un opérateur économique qui fréquente régulièrement la route Butembo- Kisangani.

Une autre leçon apprise c’est la solidarité humaine : pendant tout le temps que vous êtes resté coincé, des habitants du village, hommes et femmes, jeunes et vieux viennent en renfort et vont rester avec vous jusqu’à ce que vous ayez pu vous en sortir ! Tout le monde s’y met pour sortir le véhicule du bourbier.

Au lieu de Saint Pierre, c’est le policier qui est à la porte

En 1994, pendant l’opération turquoise menée par les militaires français, un de leurs véhicules était tombé sur la route Bukavu-Goma. Le tronçon était difficilement praticable à l’époque déjà. Plusieurs étaient morts, et depuis on appelle cet endroit : « Chez les Français ». Et vous savez quoi ? 24 ans après, soit un quart de siècle environ, l’endroit reste tout autant dangereux qu’à l’époque. 24 ans qu’un drame s’y est déroulé et jusqu’à aujourd’hui « chez les Français » reste un endroit de cauchemar pour ceux qui prennent cette route.

Et espérant arriver aux cieux au bout du voyage et de toutes ces souffrances, on arrive à destination. Et au lieu de Saint-Pierre, c’est un policier de roulage qui vous tracasse ! Il vient vérifier vos documents en cherchant le moindre défaut possible, tel Saint-Pierre qui scruterait la vie sur terre cherchant les moindres péchés avant l’entrée au paradis. Et quand « Saint-Policier de Roulage » a décidé qu’on pouvait entrer en ville, eh bien, il n’y a même pas d’électricité pour charger les appareils. Décidément les cieux ne ressemblent pas à ça, même si le chemin qui y mène est pareil. On peut donc dire que les routes du Congo, avec leurs embûches et épreuves, mènent plutôt vers l’enfer.


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