André Miguel, Artiste peintre avec « A » Majuscule


C’est l’un des pionniers de la quatrième génération de l’art visuel au Nord-Kivu. André Miguel a appris à dessiner et à décorer dès le bas âge. Aujourd’hui, il force l’admiration. Des jeunes apprenants et des anciens peintres, tous se découvrent en lui.

Pour découvrir les talents de cet artiste, il faut se rendre en plein centre-ville de Butembo, sur avenue Des martyrs, en diagonale de la salle de Royaume des témoins de Jéhovah. Ici, se trouve le CTGM, Centre des travaux généralisés et maintenance, une initiative de ce jeune artiste d’une vingtaine d’année.

Ce Jeudi 6 avril, à notre arrivée, des jeunes apprenants, en pleine production des tableaux, sont encadrés par le Directeur Général du centre. Après la présentation, André Miguel, arrête ses activités et nous oriente dans la salle d’exposition. Juste après la porte, c’est un tableau d’une femme qui a été découpée à la machette et dont les plaies ont été cousues par la suite qui nous accueille. « Les plaies représentent la guerre et les points de suture c’est pour dire que l’hémorragie doit cesser, c’est un tableau d’espoir » explique André Miguel.

A côté de ce tableau, un autre détachable en trois parties qui présente la beauté de la faune et de la flore : un éléphant dans un parc au crépuscule. Mais également un autre qui porte un gorille de montage. Ceci pour lui « démontre que ce tableau représente la beauté du parc national de Virunga qui attire des touristes de partout dans le monde pour l’admirer. S’il y a la sécurité, une bonne sécurité, le tourisme pourra renaître », poursuit-il. Ses tableaux expriment la souffrance de la population dans la région. « J’ai trouvé que nous avons beaucoup de problèmes et que moi je voulais apporter ma contribution pour trouver des solutions ».

Les plaies représentent la guerre et les points de suture c’est pour dire que l’hémorragie doit cesser, c’est un tableau d’espoir » explique André Miguel
Les plaies représentent la guerre et les points de suture c’est pour dire que l’hémorragie doit cesser, c’est un tableau d’espoir » explique André Miguel © Glodi Mirembe

Forcer l’admiration

Miguel découvre son talent de peinture et de décoration dès le bas âge. « J’ai commencé à dessiner depuis que j’ai 9 ans.  J’ai hérité cet art de mon père. Il était enseignant et avait une belle écriture qui me passionnait. C’est en voulant imiter cette belle écriture que j’ai découvert en mois des compétences de dessinateur et de décorateur », raconte-il. A cet âge, il pratiquait la peinture sur des murs des maisons ou des clôtures,  sur des arbres, dans des cahiers et même sur des tableaux des salles de classe.

Aujourd’hui, il force l’admiration. A Butembo et Beni, des signatures d’André Miguel sont presque partout : sur des pancartes, des murs d’entreprises et ONG, restaurants, magasins,… Il est aussi souvent invité dans des manifestations culturelles pour présenter ses œuvres d’esprit. « Je me spécialise plus dans l’intérieur design, c’est-à-dire la décoration intérieure des maisons et des entreprises. Un domaine qui n’est pas très exploité dans la région. Nous pouvons par exemple vous mettre une montre murale… », s’enthousiasme-t-il.

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Originaire de la province du Haut-Uélé, en territoire de Wamba, dans la chefferie de Balika-Tokiro, où il a fait ses études primaires et secondaires, A. Miguel est une étoile montante de la peinture en ville de Butembo et Beni, au Nord-Kivu. Après études à Wamba, il a d’abord enseigné à Isiro, Babonde et puis à Gbonzunzu avant d’aller en Ouganda pour une étude approfondie sur des techniques conceptuelles des designs des salons, hôtels et autres espaces de divertissement. « J’avais aussi travaillé à la CENI (Commission électorale nationale indépendante) en tant qu’agent temporaire. L’argent que j’avais gagné m’avait permis d’aller en Ouganda. Mes amis qui avaient découvert mes talents m’avaient encouragé d’y aller et je suis toujours reconnaissant envers eux», indique-t-il.

Aider les jeunes et participer à la paix 

André Miguel est venu à Butembo pour des études universitaires en Sciences de l’Information et de la Communication à l’UAC, Université de l’Assomption au Congo. Inspiré par certains cours de la communication événementielle, il dote le CTGM d’un nouveau statut et devient « une agence de communication visuelle », qui encadre des jeunes dans différents domaines. « Aujourd’hui nous encadrons 26 jeunes dans le domaine des peinture des bâtiments, de la décoration, de la photographie, du design et infographie, et des dessinateurs. J’apprends aux jeunes ce travail, mais aussi je les aide  financièrement. S’ils savent comment trouver de l’argent, ils ne peuvent pas avoir l’idée d’aller dans des groupes armés. De cette façon nous contribuons aussi à la pacification de notre milieu », indique cet artiste avec un brin de sourire aux coins des lèvres.

André Miguel peint un tableau dans son atelier © Glodi Mirembe
André Miguel peint un tableau dans son atelier © Glodi Mirembe

Dans ce domaine des œuvres d’esprits, sa réputation lui précède. Muhindo Tsongo, qui vient récupérer le tableau qu’il avait commandé sur l’histoire ancienne de la ville de Butembo, se dit satisfait du travail rendu. « J’aimerais seulement comprendre à partir des images ce que nos anciens avaient comme vie. Parce que c’était apparemment une vie de joie. Et je me sens bien en voyant ce qu’ils avaient comme vie à travers ce tableau. Je vois que cet artiste a une main d’art et je vais encore une fois passer d’autres commandes. J’ai été attiré aussi par d’autres œuvres que j’ai vues dans la salle d’exposition », explique-t-il avec admiration. Un autre admirateur précise que ce jeune artiste et ses coéquipiers sont créatifs et maitrisent bien leur domaine.

Katembo Kamate Christophe, un des disciples d’A. Miguel  âgé de 17 ans. A huit mois, il a réalisé plusieurs tableaux qui illustrent la faune, la flore et des portraits par commande. « Nous devons démontrer que le Nord-Kivu et l’Ituri ne sont pas seulement caractérisés par la guerre », annonce-t-il. « J’ai encore plusieurs projets de tableaux. C’est comme celui qui illustre le Lac Kivu et tant d’autres. J’aime trop ce boulot et j’aime trop ce tableau que j’ai réalisé récemment. Je gagne déjà des sous à partir de mon art », embraye-t-il.

Concilier les générations de la peinture

La peinture, la décoration, le dessin,… étaient en voie de disparition. Des tableaux des portraits des gens, des familles ou des couples, des tableaux qui racontent l’histoire d’un milieu, d’une génération ou des anecdotes n’existaient presque plus. Aujourd’hui ils réapparaissent petit à petit. « On peut dire que l’artiste Miguel participe au réveil de la peinture à l’Est de la RDC », explique l’artiste Kayanza, connu sous le nom de « DJokys Stars ». Il a 43 ans dans le domaine de la peinture et soutient les initiatives d’A. Miguel. « J’aime le travail d’équipe comme nous le faisons au CTGM. Je me sens bien de travailler avec les jeunes apprenants », indique-t-il.

un des disciples de Miguel à l'atelier de CTGM
Un des disciples d’A. Miguel © Photo Glodi Mirembe

Miguel et d’autres artistes sont des pionniers de la quatrième génération de l’art visuel en ville de Butembo. « Cette génération existe depuis 2010. Elle est caractérisée par des techniques mixtes, l’avènement de la technologie (bâches et photographie) à grande envergure ainsi que mixage culturel avec les matériels importés de l’étranger », explique A. Miguel.

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Pour une petite histoire, la première génération de l’art visuel est celle d’avant l’indépendance. Des artistes de cette génération étaient constitués de certains élèves des missionnaires blancs. Ces jeunes tentaient de reproduire des dessins placés dans des couvents. Ils rencontraient ces missionnaires dans leurs lieux de travail. Les blancs avaient compris que ces jeunes avaient de la passion.

La deuxième génération est celle de 1960 à 2000. Cette génération est celle qui partait apprendre auprès de leurs grands frères qui étaient des contremaitres de la première génération. C’est le cas de Kalos, Maneno, Salita,… Et enfin, la troisième génération va de 2000 à 2009. Une grande partie de cette génération a été initiée par la deuxième génération, une autre partie avait fait des études des beaux-arts. On peut citer Tsongo, précurseur des œuvres en écorce de bananiers et Daniel Kambere qui est allé étudier le réalisme à Kinshasa.

Glodi Mirembe


5 commentaires

  1. Merci infiniment pour cet article qui dit d’une façon détaillée ce que nous faisons !
    Merci au média et à tous les personnels qui le travail qualitatif que vous réalisez au quotidien ! Que Dieu vous bénisse !

    1. Bon courage cher artiste André et toute votre équipe, ce n’est pas tout le monde qui a eu l’opportunité de découvrir une passion à lui surtout façon poursuivre son rêve. Mes félicitations à vous. Merci a Ismaël pour la promotion. Le média ça évolue de son côté aussi . Merci infiniment

  2. Qu’ils viennent profité de leurs jeneusses comme je.

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