Dans plusieurs ménages de Butembo et de Beni, à environs 300 Km au Nord de Goma, en province du Nord-Kivu, à l’Est de la RDC, le coût de la vie est devenu élever, le salaire souvent insuffisant ou irrégulier. Plusieurs responsables des familles sont sans emploi. Pour réussir à survivre, certains habitants ont trouvé une idée : vendre des fourrages. C’est utile et ça marche. Reportage.
Paluku Siriwayo, est cultivateur depuis plus de 30 ans. Il y a environ dix ans il a combiné son travail d’agriculteur et la vente du fourrage. « Quand je revenais de mon champ j’en profitais pour ramener des feuilles pour nourrir mes lapins et cobayes que je domestiquent chez moi », explique-t-il. Ses voisins et certains de ses amis le sollicitaient pour qu’il leurs apporte aussi du fourrage. « Certains me remettaient de l’argent. D’autres des vivres. C’est ainsi que m’est venue l’idée de lancer un commerce des fourrages », raconte-t-il.
Agé d’une soixantaine d’années, Paluku Siriwayo est marié et Père d’une famille de sept enfants. Chaque jour dès 15h00, il étale ses produits au rond-point de cathédrale de Butembo, au croisement de la rue d’Ambiance et rue Monseigneur Kataliko. « Avant je me servais d’un petit vélo comme moyen de transport. Ça fait environ deux ans que j’utilise une vieille moto. Je parcours un voyage d’environ 10 Km à la recherche de mes marchandises (fourrages, NDLR). J’arrive en ville autour de 14h00 pour attendre des clients », indique Paluku Siriwayo.
Le soir, au retour du service, il est facile de remarquer ceux qui pratiquent cet élevage des petits bétails. On les voit sur des motos avec des fourrages sur le porte bagage. D’autres les transportant sur la tête. Ceux qui ont des véhicules, les placent dans des coffres des voitures. Ils se plaisent à parler de l’évolution de leur élevage.
Le boom de l’élevage urbain

Le fourrage se taille de plus en plus de l’espace dans le commerce informel à Butembo et à Beni. Des vendeurs qui se comptent à des milliers sont visibles dans différents quartiers, carrefours, rues et avenues… Le soir, en plein centre-ville, des étalages de vente des articles manufacturés importés de l’Asie cèdent la place à cette activité de survie. Dans des villages, certains se sont déjà constitués en grossistes de ces emplettes.
L’élevage urbain des petits bétails (cobayes, lapins, poules, porcs, chèvres…) constitue aujourd’hui presque le deuxième emploi. Pour survivre et boucler les bouts du mois, certains vont jusqu’à combiner l’élevage des petits bétails avec leurs emplois ordinaires. Avant et après le travail dans des boutiques ou des bureaux, il faut s’occuper de son élevage.
Face au boom de la démographie et à la persistance de l’insécurité, le fourrage se trouve plus à la porte d’à côté. Il faut parcourir dix à vingt kilomètres pour en trouver. « Je n’ai plus assez de temps pour aller à la recherche de fourrage en brousse. Et mes enfants sont trop pris à l’école. Il suffit de débourser 500 Fc (0,4$ USD) par jour pour nourrir mes lapins. Nombreux chercher à me décourager. Mais j’ai trouvé que c’est comme épargner dans nos banques », explique un client qui s’approvisionne auprès de Paluku Siriwayo.
Du courage et de l’organisation
Ce métier n’exige pas un grand capital. « Il faut surtout du courage et de la persévérance », indique Paluku Siriwayo. Pour mieux s’en sortir, ces vendeurs s’organisent en tontine. « Nous sommes une association jusque-là de 20 personnes. Chaque soir chaque membre donne 1000 Fc (0,5$ USD). Ce qui fait un total de 20 000 (10$). Ce montant nous le remettons en tour de rôle à chaque membre pour lui permettre de subvenir à ses besoins sans qu’il ne touche à son capital initial », explique Reagen Siriwayo, petit-fils à Paluku Siriwayo, et qui accompagne son grand-père dans cette activité.
Parmi les avantages liés à ce métier, Paluku Siriwayo parle de la survie de sa famille, de la scolarité de ses enfants et de ses petits-fils. Des femmes, qui sont aussi nombreuses dans ce métier expliquent que ce commerce leurs permettent de contribuer à la survie de leurs ménages.
Laetitia Kamathe Vusara