RDC: quand les chômeurs se méfient des offres d’emploi


Des demandeurs d’emploi se méfient de plus en plus des offres affichées sur des portails des ONG ou diffusées dans des radios, des sites internet et autres… Les demandeurs d’emploi sont convaincus que des entreprises et organisations n’affichent ces offres que par formalité ; les postes étant déjà échus à leurs membres de famille, amis et proches…

Vers fin juin 2021, une ONG basée à Goma a publié une offre pour 4 postes. Elle a placé des affiches dans des universités et instituts supérieurs, sur les portes des ONG et même diffusés dans toutes les radios locales. Mais à l’issue de l’échéance aucune demande n’a été déposée. « On a dû prolonger l’échéance pour avoir quelques dossiers », témoigne un agent dans une ONG locale qui a voulu rester anonyme.

Pourtant il y a encore dix ans, de demandeurs d’emploi se bousculaient pour lire des affiches des offres. Les annonceurs se retrouvaient débordés par les dossiers des candidatures. La ferveur a jadis baissé. « Ils nous prennent pour des naïfs, pour des idiots… C’est connu de tous qu’ils s’amusent à lancer des offres. Les places sont souvent déjà occupées…», lance Muhongya Fabrice, après avoir lu des offres de recrutement d’un chauffeur et d’une assistante à la recherche, des emplois affichés sur les valves d’une université située dans la ville de Butembo (province du Nord-Kivu), à l’est de la République démocratique du Congo (RDC).

Offre ton corps, je t’offre l’emploi

Selon une publication du BIT (Bureau International du Travail), le chômage reste essentiellement un phénomène en RDC touchant en majorité les jeunes de 15 à 24 ans, avec un taux estimé à 15,85% contre 9,37% pour les adultes. Les jeunes femmes demeurent plus affectées par cette situation dramatique du chômage car leur taux de chômage avoisine 20 %.

Pourtant plusieurs offres indiquent clairement que « Des candidatures famines sont encouragées ». « Cette indication est seulement au niveau de la forme. Mais il faut voir ce que les recruteurs ou même les chefs d’entreprises et organisations exigent aux femmes avant leurs embauches. Vous êtes sans ignorer ce qui s’était passée lors de l’embauche des femmes dans la dixième épidémie d’Ebola en RDC ! », s’exclame une dame qui refuse de nous raconter son parcours pour accéder à son poste.

Même son de cloche pour une autre dame. « Toutes les fois que je postule à un emploi, on m’exige ce qu’on peut exiger à une dame. Mais je trouve que ça ne me plait pas. Je comprends qu’avec mon attitude je n’aurais pas d’emploi », explique-t-elle sous anonymat. Toutes fois ce n’est pas général. D’autres femmes et qui ont voulu rester explique qu’elles sont suivi un parcours normal pour accéder à l’emploi ou un poste de commandement. Pour celles-ci, certains arguments ne sont que des préjugés.      

La famille avant la compétence

Les tests d’embauche ne sont souvent qu’une simple formalité. Seuls les candidats connus sont recrutés même sans les qualifications requises. Cette pratique qui gangrène le marché du travail influe sur le rendement et exaspère les chômeurs. « Pour être retenu, il faut avoir un parapluie », se désole Kambale Kataliko, ce jeune licencié en sociologie et qui n’a pas encore décroché du travail après avoir fait plusieurs demandes. Selon lui, l’emploi est une question de famille, d’amis et connaissances. Il faut être connu au sein de l’entreprise.

Les ONG et les services étatiques sont les plus indexés. Dans ce monde des ONG, il faut avoir quelqu’un de l’organisation qui vous tiendra informé sur l’opportunité d’un poste. « Sans parapluie, il ne faut même pas vous y hasarder », lance Kambale Sabuni à son ami, enveloppe-sac en main, à la recherche d’un emploi. « Nous avons passé le test d’embauche à 45 pour quatre postes dans une ONG locale. Aucun des postulants n’a été retenu. Le lendemain nous avons été surpris de voir des agents qui n’avaient pas participé au test occuper ces postes… », se souvient encore Immaculée Syaghuswa.

Elle a postulé à des offres d’emploi, passé des tests, sans suite. Elle n’a pas de « piston » qui puisse intercéder en sa faveur. Parfois, il faut proposer un cadeau, de la corruption déguisée comme une chèvre ou des casiers de bière ou même devenir la concubine du chef.

Gâcher le plaisir d’étudier

En parcourant les termes de référence de différentes offres d’emploi en RDC, les jeunes en recherche de travail ont tendance à se réjouir en lisant les premières lignes. Certes, on peut avoir la qualification et les compétences requises pour occuper tel ou tel emploi, mais vite on tombe sur une maudite phrase : « Avoir une ancienneté ou expérience professionnelle obligatoire d’au moins cinq ans dans le domaine X ou dans la fonction Y ».

Imaginez que vous venez fraîchement de décrocher votre diplôme universitaire, mais l’employeur exige de vous 10 ans d’expérience professionnelle pour vous prendre dans son entreprise ! Cela gâche tout le plaisir d’avoir étudié. Selon un responsable d’une ONG nationale, quelqu’un qui a déjà travaillé ne pourrait commettre des fautes que commettrait un novice. De son côté, un ami travaillant dans les ONG m’a confié que parfois les organisations ont besoin de mettre la barre plus haute pour éliminer d’indésirables nouveaux venus. Tout cela fait que souvent après l’université, c’est l’école du chômage en RDC !

Déséquilibre du marché d’emploi

Malekani Wangeve, inspecteur du travail en ville de Butembo reconnaît ce phénomène qui gangrène le marché de l’emploi mais essaie de temporiser. Pour lui, la situation est due au déséquilibre du marché de l’emploi. « Pour un seul poste, vous avez plus de 500 postulants. Chacun espère être retenu. Le chômage est exaspérant et lorsqu’on échoue à un test, il faut encaisser », explique-t-il. Certains travailleurs, cadres des ONG assurent même que cette pratique n’est plus fréquente.

Toutefois, cette crise de confiance envers des organisations s’est déjà instaurée. « Bien que la réalité n’est pas la même dans toutes les organisations, il est devenu difficile de convaincre les jeunes de postuler », pense Israël Kamuha, qui a décroché son diplôme de licence en Agronomie depuis trois ans et qui n’a pas encore d’emploi.

Umbo Salama


Un commentaire

  1. ça ce la pure verité ils nous prennent pour des enfants après avoir donner les postes à leurs familiers et pleins de corruption ils affiche les offres pour nous flatter

    BENI DRC

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