Inquiétante consommation de la chauve-souris à Butembo et Beni


Elle est sur le banc des accusés comme porteuse du virus d’Ebola voire de la pandémie de covid-19, mais elle est toujours très consommée à Beni et Butembo, au Nord-Kivu, dans l’Est de la RDC. Des chasseurs et vendeurs font passer l’argent avant la vie, pendant que les autorités locales ne s’inquiètent guère.

Ce 30 Juin 2021, journée de l’accession de la RDC à son indépendance, l’ambiance est particulière dans une buvette, au quartier de l’Evêché, en cellule London (Kitovero), en commune de Bulengera. Après avoir exécuté quelques pas de dance d’une musique de Fally Ipupa, Germain Katembo, un habitué de cette buvette, regagne sa place où un bon plat de viande de chauve-souris l’attend.

Il croque quelques morceaux qu’il accompagne d’une bonne gorgée de Kasiki (vin local produit à base des bananes). « C’est une Poule Anglaise », explique-t-il avec un sourire au coin des lèvres. Poule Anglaise, c’est le surnom de la chauve-souris dans les milieux où on consomme cette viande. « Des clients viennent de tous les coins de la ville. Il y a ceux qui parcourent même 5 Km pour venir consommer cette viande de chauve-souris », soutient un habitant de la cellule London.

La passivité de l’Etat s’en mêle

Pourtant la chauve-souris est accusée comme un des vecteurs du virus d’Ebola et même de covid-19. Mais des consommateurs ne sont pas encore prêts d’arrêter. C’est le cas de Germain Katembo qui en consomme depuis son enfance. «Je viens ici chaque fois quand j’ai envie et je ne vois aucun danger de consommer une chauve-souris. Même nos parents quand ils veulent varier le régime alimentaire à la maison ils viennent acheter ces poules Anglaises (chauves-souris) », indique Gemain Katembo.

Comme Germain, plusieurs consommateurs de cette viande se soucient moins des risques de contamination. « Je sais que notre ville sort d’une épidémie d’Ebola mais les chauves-souris sont tuées souvent dans les bosquets derrière le bureau de la commune Bulengera et les autorités ne les  inquiètent pas. Donc pour moi ce n’est pas un problème si j’en consomme », se dédouane sans vergogne ce jeune garçon de 25 ans exécutant quelques pas de danse après avoir avalé une gorgée de « Kasikisi ».

D’abord l’argent, la santé après

Si les consommateurs ne sont pas prêts d’arrêter, les vendeurs et chasseurs de leurs côtés, disent tirer des profits de ce métier. « C’est une bonne affaire », se réjouit Kambale Saint Léon. « Avec ma lance pierre Je peux tuer 80 ou 100 chauves-souris à l’espace de deux jours. Et nos clients viennent nous les acheter à gros à 1500 Fc (environs 0,75$). En deux jours je peux empocher 75 ou 100$ », s’enthousiasme Kambale Saint Léon. Il chasse des chauves-souris depuis son enfance. Pour lui, il suffit d’avoir des muscles et être un bon tireur pouvant blesser une chauve-souris.  

Même son de cloche du côté de Kahindo Ange, une des vendeuses de ces mammifères-volants en cellule London dans le quartier de l’Evêché. Elle vend entre 30 et 50 chauves-souris par jour. Ici, une chauve-souris se négocie entre 2500Fc et 3000 Fc (2,25 $ et 2,5$).  « C’est mon boulot. C’est de ce business que je fais vivre ma famille.  Quand on ne sait pas les trouver à Butembo, les chasseurs se ploient à Musienne (17 km au Sud de Butembo) tantôt à Muhangi (50km à l’Ouest de Butembo) ou encore à Beni (54 Km au Nord de Butembo) pour les chasser », embraye Khindo Anges.

Au service de l’AGRIPEL (Agriculture, pêche et élevage) on émet de réserves sur l’espèce de chauve-souris consommée à Butembo. « Il n’y a jamais eu une étude suffisante pour attester que ces espèce sont dans la catégorie de celles qui peuvent transmettre des virus d’Ebola. Mais personnellement je crois qu’il faut se méfier et user beaucoup de prudences surtout qu’on ne connait pas leur l’origine et donc jusqu’à preuve de contraire la consommation de ses chauve-souris constitue un danger permanant dans la société », conseille un agent de ce service.

Alpha Vwamara


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